La formation de ce fils de boulanger, à Lyon, auprès de Pierre Révoil, est très tôt couronnée de succès : il obtient le prix de la classe de figure de l’École des beaux-arts de Lyon en 1809, et le Laurier d’Or en 1813. Ses premiers tableaux exposés au Salon à Paris sont achetés par le duc de Berry (Chambre à coucher des petits savoyards en 1817, Vieillard aveugle conduit par sa petite-fille en 1819, collection particulière). Aux yeux de la critique parisienne, ceux-ci encourent le blâme d’une manière trop minutieuse qui pèse d’ailleurs sur toute l’école lyonnaise. Les six mois que Bonnefond passe dans l’atelier de Guérin en 1822 avaient sans doute pour but de corriger ce défaut, mais c’est surtout son séjour à Rome, de 1825 à 1830, qui va agrandir sa manière.

Au cours de ces cinq années, Bonnefond délaisse la peinture d’histoire traditionnelle pour embrasser le folklore local des brigands, pifferari, pèlerins et autres diseuses de bonne aventure, sujets constituant un genre à part entière depuis que Léopold Robert en a révélé le potentiel pittoresque. La figure du brigand, dont les exploits emplissent les pages des gazettes depuis des décennies, a fait une entrée dramatique dans la Rome des années 1820 avec l’arrestation de Mazzochi et de sa bande, en 1819. Léopold Robert et Achille-Etna Michallon furent les premiers artistes à solliciter des autorités papales la permission de les étudier dans les prisons du château Saint-Ange et des thermes de Dioclétien. La vogue des brigands a rapidement gagné toute la colonie d’artistes français gravitant autour de la villa Médicis : Victor Schnetz, Guillaume Bodinier, Léon Cogniet, Jean Alaux, Horace Vernet, s’en emparent en même temps que Bonnefond.

Stendhal s’est fait l’écho de la fascination qu’exercent ces hors-la-loi : « tout le monde redoute les brigands ; mais, chose étrange ! chacun en particulier les plaint lorsqu’ils reçoivent le châtiment de leurs crimes. Enfin, on leur porte une sorte de respect jusque dans l’exercice du droit terrible qu’ils se sont arrogé. Le peuple italien fait la lecture habituelle de petits poèmes où sont rappelées les circonstances remarquables de la vie des brigands les plus renommés ; ce qu’il y a d’héroïque lui en plaît, et il finit par avoir pour eux une admiration qui tient beaucoup du sentiment que, dans l’Antiquité, les Grecs avaient pour certains de leurs demi-dieux1. » Dans cette aquarelle, le peintre a accentué la terribilità du héros en le saisissant dans une posture menaçante, prêt à user de son poignard, action qui contraste avec l’image de la Vierge qu’il vénère, fichée sur son chapeau, tandis que son costume bigarré déploie toute sa panoplie pittoresque. (M.K.)

 

 

 

 

1. Stendhal, « Les brigands en Italie », dans Voyages en Italie, textes établis, présentés et annotés par V. del Litto, Paris, 1973, p. 1234-1235.

 

 

 

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